Le Carnaval de Martinique : Histoire, Traditions et Programme
Le Carnaval de Martinique, événement majeur de l’île, trouve ses origines dans la colonisation et le métissage culturel entre traditions africaines et européennes. À l’origine, le Carnaval est une fête chrétienne issue du Moyen Âge. En Europe, il précède le Carême et permet de festoyer avant la période de jeûne. Introduit en Martinique par les colons français au 17ème siècle, il se transforme progressivement sous l’influence des esclaves africains qui y intègrent leurs propres rites, danses et musiques.
Origines et Évolution du Carnaval
Durant la période esclavagiste, les colons célébraient le Carnaval dans leurs habitations avec des festivités luxueuses. Les esclaves, imitant ces pratiques tout en conservant leurs traditions, créèrent leur propre version du Carnaval. Malgré des interdictions successives, la fête devint, après l’abolition de l’esclavage en 1848, un événement populaire partagé par toute la population.
Jusqu’en 1902, Saint-Pierre, alors capitale de l’île, était le centre du Carnaval. Après l’éruption de la Montagne Pelée, qui détruisit la ville, Fort-de-France reprit le flambeau. Aujourd’hui, le Carnaval martiniquais est un moment de liesse collective, attirant habitants et visiteurs pour des journées de défilés et de festivités endiablées.
Les Personnages Emblématiques
Le Carnaval de Martinique se distingue par la présence de personnages mythiques, chacun incarnant une symbolique forte :
· Sa Majesté Vaval : Roi du Carnaval, cette marionnette géante représente un personnage ou un fait marquant de l’actualité. Il est brûlé le Mercredi des Cendres pour marquer la fin des festivités.
· Le Diable Rouge : Héritage africain, il arbore des cornes et un masque effrayant et domine le Mardi Gras.
· La Guiablesse ou Djables : Veuve éplorée de Vaval, elle apparaît en noir et blanc pour pleurer sa disparition.
· Le Coupeur de Canne : Apparition post-abolition, il tourne en dérision l’oppression passée.
· Le Nèg Gwo Siwo : Recouvert de sirop de canne et de charbon, il effraie la foule.
· Le Touloulou : Inspiré du Carnaval guyanais, ce personnage masqué représente la femme dominatrice.
· Les Mokozombies : Échassiers traditionnels présents dans plusieurs carnavals caribéens.
· Maryan Lapo Fig : Inspiré d’une légende de Saint-Pierre, il évoque un ours de cirque disparu.
· Les hommes d’argiles : Ils apparaissent dans les annés 1990 aux Trois Îlets. Enduits d’argile ocre, ils se figent dans des tableaux illustrant la vie quotidienne.
Déroulement du Carnaval
Bien que les festivités commencent dès l’Épiphanie avec des parades locales, le cœur du Carnaval s’étend sur quatre jours :
· Dimanche Gras : Présentation de Vaval et ouverture officielle des festivités avec un défilé haut en couleurs.
· Lundi Gras : Célébration du « mariage burlesque », où hommes et femmes inversent leurs rôles, et grand vidé dans le sud de l’île.
· Mardi Gras : Journée des Diables Rouges, précédée du traditionnel « Pijama Lévé », une parade matinale en chemise de nuit.
· Mercredi des Cendres : Fin du Carnaval avec le cortège en noir et blanc et la crémation de Vaval.
Grâce à une dérogation papale, le Carême ne débute que le jeudi à minuit, permettant aux festivités de se prolonger plus que dans les pays catholiques classiques.
Un Carnaval moderne et populaire
Aujourd’hui, le Carnaval de Fort-de-France est le plus célèbre, mais d’autres communes gagnent en popularité. Le « vidé », ou cortège musical, est porté par les groupes à pied, véritables âmes du Carnaval, qui répètent toute l’année pour ces jours d’effervescence.
L’un des spectacles les plus attendus est l’élection des Reines du Carnaval : la Reine, la Reine-Mère et la Mini-Reine. Élues pour leur prestance et leurs costumes confectionnés à partir de matériaux de récupération, elles défilent sur un char lors des parades.
Autre tradition marquante : les « bradjacks » (”bwadjacks”), voitures “réformées” décorées, qui reviennent dans les cortèges après des périodes d’interdiction pour raisons de sécurité.
Après le Carnaval
Le Jeudi qui suit le Mercredi des Cendres marque un contraste frappant : l’île retrouve son calme. Mais en Martinique, la fête ne s’arrête jamais vraiment. Dès le lendemain, débute la chasse aux crabes, qui seront consommés lors du repas pascal.
Le Carnaval martiniquais, riche de son héritage et de son dynamisme, demeure un moment incontournable de l’année, alliant tradition et créativité dans un tourbillon de couleurs, de musiques et de joie collective.
